Censée représenter ceux du monde entier, l'image qui accompagne le poème Les ponts montre l'ouvrage qui relie, au bout du pays Bigouden, les rives du Guilvinec à celles de Léchiagat. L'on parle de la suppression de ce pont afin de permettre le passage des hauts mâts de voiliers de croisière. Un pont amovible le remplacerait. Si tel était le cas, l'on ne pourrait plus voir comme de blancs moutons sur la photo les nuages emprunter le pont en file indienne, depuis le phare jusqu'à la criée. D'ailleurs, je ne connais personne qui soit insensible à la poésie des ponts. En rapprochant deux étrangers semblables que la nature sépare, ils sont l'essence même de l'art. S'ils résument la vie en quelques pas, il ne faut jamais oublier qu'ils donnent de la domination le meilleur sens possible, celui de la traversée. Les poèmes dignes de ce nom ne recherchent rien d'autre.
LES PONTS
Sur l’eau les ponts s’agenouillent.
On dirait qu’ils prient.
Parfois des êtres désespérés
sautent par-dessus.
Mais les ponts ne les retiennent pas
ou alors leur inspirent
une dernière pensée.
On dirait qu’ils rêvent.
C’est une idée variable. Parfois des malfaiteurs
les empruntent dans leur fuite.
Les ponts acclament leurs espoirs.
Mais ils se cabrent si fort
qu’en pleine traversée
ils cassent un jour.
On dirait de haut
qu’on les voit encore.
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