Amputée de sa première lettre peu après la fermeture définitive de la boutique, l'enseigne du menuisier m'a révélé un nouveau type de commerce : l'enuiserie. M'entendant moyennement avec l'ennui, l'envie m'est venue de regarder si j'avais jamais traité ce thème en poésie. Quel ne fut pas mon étonnement de recenser cinq poèmes ! Je n'en suis pas revenu. Les ayant alignés, j'y ai ajouté alors une ponctuation qui rendra peut-être leur lecture plus facile. Après un long silence de bloc dans ce blog, je n'ai tout de même pas pensé que l'on ait pu s'ennuyer de moi, en me laissant marchander ces mots : à l'enuiserie l'ennui se rit.
LE NUAGE DE L’ENNUI
Sur nul mouton de Panurge,
Toi nuage de l’ennui
Ne dénude tes lainures
Des mains d’une nuit sans lune
Qu’un univers sinueux,
Venu d’un vieux manuel,
Enumère à l’inutile
Retenue, dans l’inconnu
D’une union des annulaires.
ET PUIS ET PUIS
Et puis et puis,
Les jours de pluie,
Chacun s’ennuie,
Sinon s’enfuit
Au fond d’un puits,
S’épuise et puis
Cherche un appui,
Rentre chez lui
Quand vient la nuit.
COMPÈRE L’ENNUI
Du bonheur ou du malheur,
Qui rend le plus malheureux ?
M’a demandé compère l’ennui,
Avec son air des mauvais jours
Le poing levé vers le ciel.
Et je lui ai répondu :
Peu m’inspire ta question,
Entre bonheur et malheur,
Quand les passions se déchaînent,
Les armes remplacent les formes.
Au lieu de te lamenter
Tu devrais faire comme moi,
M’a ordonné compère l’ennui,
En se signant de la croix
Qui annule les commandes.
LE JOUR S’ENNUIE
Le jour s’ennuie,
Et c’est la nuit
Qui nous envoie
Là où l’on voit
Le temps d’avant,
En grand savant
Qui nous appelle,
Et pêle-mêle
Nous revenons
Sur nos vœux. Non
Jamais la mort
Ne sème l’or
De nos miroirs,
Profonds et noirs.
LE SANS-GRADE
Ce gars sans biens
Ne garde rien,
Sinon les nuits
Où il s’ennuie,
Et il s’effare,
Gardien sans phare,
S’enflamme un peu,
Gardien sans feu,
Gardien encore,
Sans les décors
Où il s’entraîne,
Privé d’étrennes,
Gardien qui erre
Aux sanctuaires,
Où l’on s’entend
De temps en temps.
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